Sur Telegram, le business de l’émeute


La nuit s’apprête à tomber sur Marseille, samedi 1er juillet, alors que, presque simultanément sur Telegram, au moins cinq chaînes diffusent le même message : « [21h50] Des adolescents allument des feux dans le centre de Marseille en ce moment. » La vidéo montre, sur une place, ce qui apparaît comme un feu improvisé, dans lequel on peut discerner une planche, un chariot, et d’autres objets non identifiés, alors qu’un hélicoptère survole la cité phocéenne.

Le document a initialement été diffusé par un compte Twitter, @ConfrontFR, mais est immédiatement repris par plusieurs canaux d’information amateurs sur le réseau Telegram. Chacun s’approprie les images à sa façon : alors que la chaîne Telegram RelaisInformation décide d’apposer sa propre watermark (marque en filigrane) par-dessus le nom apparaissant à l’origine dans la vidéo, Info France, elle, décide de recadrer les images pour faire disparaître toute signature.

Telegram, comme bien d’autres réseaux sociaux, a massivement diffusé des images des émeutes déclenchées par la mort de Nahel M., tué par un policier à Nanterre le 27 juin. Sur cette messagerie où chacun peut créer des canaux de diffusion, ces nuits de violences ont été abondamment suivies par un petit nombre chaînes, dont certaines rassemblent des centaines de milliers d’abonnés. La concurrence fait souvent rage : il faut avoir les meilleures sources, être le premier à publier une vidéo, souvent au détriment du temps de vérification de l’information.

Comme sur Twitter, où les comptes dévolus à l’actualité postent à un rythme souvent effréné, les dizaines de chaînes dont les messages ont été copieusement diffusés ces derniers jours oscillent entre le sensationnalisme pur et la démarche amatrice mais journalistique, avec la volonté d’informer. En témoigne l’exemple d’un petit canal de diffusion annonçant lundi qu’il allait revenir à un « fil d’actualité plus classique et non pas seulement consacré aux émeutes ». La plupart des messages reprennent des informations et contenus publiés par la presse ou par des témoins ; certaines vidéos « exclusives », rapidement copiées par d’autres canaux concurrents, parviennent aux administrateurs par le biais d’appels à témoignages.

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Paris sportifs et placements douteux

Mais d’autres canaux de diffusion, parfois très suivis, profitent surtout de la viralité des vidéos de violences urbaines pour entretenir un business complexe et propre à Telegram, plate-forme souvent envahie par des arnaques et des publicités pour des produits financiers douteux. Le modèle est souvent le même : une chaîne va diffuser de nombreuses vidéos en guise d’appât, le plus souvent reprises d’autres sources, et renvoyer discrètement ses abonnés vers une autre chaîne, présentée comme contenant des contenus « inédits ».

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